La carrière de Paul Ambert a montré une bivalence permanente placée entre un besoin de comprendre les paysages et la compréhension de l’évolution des sociétés humaines. Géologue et géomorphologue, Paul avait la connaissance de la formation des reliefs, prenant en compte toutes les échelles de temps. En parallèle, sa passion pour l’archéologie, qui l’a saisi dès son plus jeune âge, l’a amené à s’interroger sur l’évolution sociale des groupes humains de la Préhistoire, ainsi qu’à replacer l’Homme dans l’évolution géomorphologique de la France méditerranéenne.
Paul c’était d’abord un regard qui au premier coup d’œil découvrait son interlocuteur et l’emmenait, comme pour un test, sur les passions de sa vie, le quotidien, la nature, le sport, la géologie, la géomorphologie et la préhistoire. Paul aimait plus que tout partager ses connaissances et celles des autres, l’humanité du travail en équipe et ce besoin insatiable de comprendre comment et pourquoi aujourd’hui nous en sommes là. Que s’est-il passé hier sur terre pour que l’homme d’aujourd’hui comme celui d’avant-hier ait réagi en ce sens et nous ait laissé ces traces ?
De fait, replaçant en permanence le rôle de l’évolution géomorphologique dans l’impact naturel imposé aux sociétés anciennes, mais aussi en retour, l’impact de l’Homme dans cette évolution, Paul a compris que la richesse scientifique était dans cette interaction. Il a dès lors regardé sous un autre angle les sites archéologiques, s’interrogeant sur les discordances entre une analyse uniquement portée sur l’objet et l’histoire de la matrice qui l’enfermait dont on ne peut le dissocier. Cet objet ne devenait plus qu’un simple marqueur dans la vie du site. Paul a su convaincre, par un discours simple mais argumenté, que le fait archéologique n’avait d’intérêt que s’il était intégré dans les faits naturels. Mais cette démarche, si elle parait évidente aujourd’hui, n’était pas acquise à l’époque. Elle a été le fruit de très longues recherches de terrain, d’une expérience acquise par les anciens, par ses prédécesseurs dont il savait analyser le discours et replacer le travail dans un contexte passé, souvent difficile et sans repère : d’autres temps, d’autres moyens. Paul a toujours su apprécier le travail réalisé, il a très vite compris que l’erreur de la recherche d’hier lui permettait aujourd’hui d’avancer pour asseoir la connaissance de demain. C’est dans la pleine cohérence et respect de cette démarche, de cette implication permanente entre le fait naturel et le fait anthropique que Paul a renouvelé la lecture des sites archéologiques, a affiné la lecture géomorphologique par l’archéologie : Paul a été un des premiers géoarchéologues.
Paul avait également et surtout envie de partager ses recherches, transmettre ses connaissances et son expérience. Il avait aussi besoin de puiser dans les autres cette énergie dont il se nourrissait. Il recherchait des regards complémentaires capables de l’interroger, de l’obliger à comprendre autrement. Paul n’était pas isolé, il collaborait énormément avec une foule d’autres chercheurs, issus de nombreux laboratoires. Il ne croyait pas aux frontières qui, comme son esprit, devaient être ouvertes. Mais Paul appréciait plus que tout « son équipe » ses amis, qui au quotidien sur le terrain et dans une approche naturaliste avec ce regard élargi qu’il appréciait tant, lui permettait de renouveler les données de ses recherches. Paul croyait et appréciait, plus que tout, les jeunes chercheurs. Ceux qui étaient motivés, ouverts et disponibles pouvaient compter sur son soutien indéfectible : ses connaissances, comme sa bibliothèque et son cœur leurs étaient ouverts.
Qui aujourd’hui a conscience de la contribution de Paul Ambert
à l’approche géoarchéologique, celle qui va de la coupe au paysage, du tesson à la source d’argile, de la truelle au marteau de géologue !
Les motivations sont ainsi multiples à avoir fait naître le projet de ce colloque en hommage à Paul Ambert. Plus que de fêter l’homme, et il le mérite, cette rencontre se veut non pas comme une reconnaissance, mais bien l’explication d’un travail, d’une recherche polynucléaire largement diversifiée dans ses thèmes. Cette carrière a été rendue plus que difficile par une maladie qui aurait poussé tout un chacun dans le « claustra » personnel. Mais ce sont ces difficultés souvent incontournables au quotidien qui ont poussé Paul à avancer sans se recroqueviller sur les résultats d’une recherche qui semblait suffisante pour d’autres. C’est en avançant en dehors des préjugés, sans hésiter à remettre en cause les concepts, que Paul a renouvelé l’histoire de la recherche.
Ce colloque présentera deux sessions placées autour des recherches conduites par Paul. La première abordera, autour de personnes invitées, des synthèses qui montreront l’originalité et l’impact des travaux de Paul dans les disciplines considérées :
La géologie, la géomorphologie, la karstologie, la géoarchéologie, l’archéologie des territoires, la Préhistoire, le Paléolithique, l’art pariétal, les sociétés du Néolithique, le phénomène du mégalithisme, la paléométallurgie.
La deuxième session de ce colloque concernera plus directement l’actualité de la recherche dans les thématiques d’études abordées par Paul. Ces communications seront de préférence ouvertes aux jeunes chercheurs et permettront de mesurer les acquis et les ouvertures des problématiques si chères à Paul. Une session poster est également envisagée et ce, en fonction du nombre des propositions de communications.
Ce colloque sera également l’occasion de fêter les 40 ans des recherches archéologiques autour du district minier de Cabrières-Péret, travaux dans lesquels toutes les sensibilités de Paul se sont exprimées. Comme Paul le voulait, sur le terrain, ce doit être un moment simple mais festif, sans fioritures ni façade, uniquement du vrai, du direct…